08/03/19

Licenciement avec effet immédiat abusif – réparation des différents préjudices – modalités de calculs

Quant à l’indemnité compensatoire de préavis :

L’employeur ne conteste pas que la salariée, qui avait une ancienneté de sept ans, a droit a droit à une indemnité compensatoire de préavis correspondant à quatre mois de salaire.

Il conteste cependant la prise en compte du salaire brut pour fixer le montant de l’indemnité compensatoire de préavis au motif que dans le cadre d’un licenciement avec effet immédiat déclaré abusif, le préavis perdrait son caractère de salaire pour se transformer en indemnité. Il deviendrait ainsi une composante de l’indemnisation pour résiliation abusive.

Comme conformément à l’article 115 9 b) de la LIR « l’indemnité pour résiliation abusive du contrat de travail fixée par la juridiction du travail » serait exemptée d’impôt sur le revenu jusqu’à un plafond de douze fois le salaire social minimum, l’indemnité compensatoire de préavis serait exemptée d’impôt sur le revenu jusqu’au plafond précité, de sorte que le fait de calculer l’indemnité de préavis sur base du salaire brut, entraînerait un enrichissement du salarié abusivement licencié avec effet immédiat par rapport à un salarié abusivement licencié avec préavis.

En tenant compte du principe de la réparation intégrale, il conviendrait partant d’utiliser comme base de calcul le salaire net de base de l’intimée, à savoir le montant de 2.029,28 euros.

A titre subsidiaire, l’employeur soutient que le calcul du tribunal de travail est erroné alors que le salaire mensuel brut de A s’élevait seulement à 2.258,84 euros. En effet, l’avantage en nature correspondant au véhicule de fonction ne serait pas à prendre en compte pour calculer l’indemnité de préavis étant donné que la voiture n’avait été mise à la disposition à A que pour l’exécution de sa fonction.

A conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a pris en compte son salaire mensuel brut de 2.545,18 euros, l’avantage en nature d’un montant de 285,80 euros faisant partie intégrante de son salaire.

La partie qui résilie le contrat à durée indéterminée sans y être autorisée par suite d’une faute grave du salarié ou sans respecter les délais de préavis prescrits, est tenue de payer à l’autre une indemnité compensatoire de préavis égale au salaire correspondant à la durée du préavis, ou le cas échéant, à la partie de ce délai restant à courir.

L’indemnité compensatoire de préavis constitue donc un substitut de salaire qui ne peut être réduit ou supprimé. Son montant équivaut au montant de la rémunération brute alors que les retenues légales représentent une partie du salaire.

Le premier moyen de l’employeur est donc à rejeter.

Par contre, la mise à disposition d’un véhicule ne constitue un avantage en nature que si le salarié est en droit de l’utiliser à des fins privées. Une utilisation à des fins professionnelles relève de l’exécution du contrat de travail et de la mise à disposition au salarié d’un outil de travail.

Comme la salariée ne soutient ni à fortiori n’établit qu’elle pouvait utiliser la voiture à des fins privées, il n’y a partant lieu de ne tenir compte que du salaire brut de base de 2.258,84 euros.

Par réformation du jugement entrepris, la demande de A n’est donc fondée qu’à concurrence du montant de 2.258,84 X 4 = 9.035,36 euros.

Quant à l’indemnité de départ :

L’employeur conteste également le montant de l’indemnité de départ. L’indemnité de départ est calculée sur base des salaires bruts effectivement versés au salarié pour les douze derniers mois qui précèdent immédiatement celui de la notification de la résiliation.

La demande de la salariée est dès lors à déclarer fondée pour le montant de 2.258,84 euros.

Quant à l’indemnité pour préjudice matériel :

A demande à se voir allouer le montant de 9.950,18 euros, correspondant à la différence entre le salaire qu’elle aurait touché auprès de son ancien employeur et les indemnités de chômages perçues pour la période du 17 décembre 2013 à août 2014.

Elle explique que malgré d’innombrables efforts, elle n’a pas retrouvé un nouvel emploi. Elle aurait finalement ouvert une sandwicherie-librairie-papeterie en septembre 2014.

L’employeur conclut au rejet de la demande. La salariée ne se serait pas inscrite comme demanderesse d’emploi au Luxembourg et elle aurait seulement versé 11 demandes d’emploi pour la période d’août 2013 à janvier 2014.

Tout comme la juridiction de première instance, la Cour constate que A n’établit pas qu’elle ait encore fait des recherches actives pour trouver un nouvel emploi après janvier 2014. Elle a, par contre signé en date du 8 janvier 2014 un contrat de bail commercial pour un local destiné à l’exploitation d’une librairie. (C.S.J., III, 05/07/2018, 44762).

Le tribunal du travail est donc à confirmer par adoption de ses motifs en ce qu’il a retenu que la salariée n’a pas établi que son dommage matériel, au-delà de la période couverte par l’indemnité de préavis de quatre mois, soit toujours en lien causal avec le dommage et qu’il a rejeté en conséquence la demande de A.

Quant à l’indemnité pour préjudice moral :

La SA S2 soutient que A reste en défaut d’établir qu’elle s’est réellement fait du souci quant à son avenir et qu’elle a recherché activement un emploi. La salariée serait donc à débouter de sa demande en allocation d’une indemnisation pour le préjudice moral. A titre subsidiaire, elle demande à voir réduire l’indemnité à de plus justes proportions.

Par adoption des motifs de la juridiction de première instance que la Cour fait siens, l’indemnisation du préjudice moral subi par A du fait de l’atteinte portée à sa dignité de travailleur est à fixer au montant de 2.500 euros. Il suit des considérations qui précèdent que la demande de A est fondée pour le montant total de 9.035,36 + 2.258,84 + 2.500 = 13.794,20 euros. riptions,sh

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