A la demande du salarié, l’employeur a fait connaître les motifs du licenciement par courrier du 8 mai 2008.
L’employeur déclare avoir procédé au licenciement pour des raisons économiques. L’activité du laboratoire aurait fortement baissé, suite à des pertes substantielles de clients, entre autres sur le marché allemand.
De 2006 à 2007, le chiffre d’affaires aurait diminué de 12%. L’exercice 2007 se serait conclu avec des pertes imprévisibles, tandis que les frais de personnel, qui représenteraient 75% des frais, seraient restés inchangés. Au premier trimestre de 2008, le chiffre d’affaires aurait à nouveau diminué de 12% par rapport à 2007, de sorte qu’une perte d’environ 26% par rapport à 2006 devrait être constatée. Les efforts du laboratoire pour gagner de nouveaux clients seraient sans résultat.
Afin d’éviter des risques futurs d’insolvabilité et de mettre en péril l’entreprise, la suppression du poste de M. A.) aurait été inévitable.
Le tribunal du travail a retenu que la lettre de licenciement répond à l’exigence légale d’une indication précise des motifs du licenciement. L’employeur conclut à la réformation du jugement en ce qu’il a déclaré le licenciement abusif, considérant que les motifs du licenciement invoqués ne seraient pas réels et sérieux.
Le salarié ne conclut pas à la réformation du jugement en ce qu’il a retenu le caractère précis des motifs, mais demande la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré le licenciement abusif, faute de motif réel et sérieux. Il convient dès lors d’examiner si les motifs indiqués dans la lettre de licenciement sont réels et sérieux. L’employeur soutient qu’en 2008, dix salariés auraient quitté l’entreprise et n’auraient pas été remplacés, ce qui constituerait une économie annuelle sur la masse salariale de 241.948,32 euros.
En examinant ces départs et l’incidence sur les dépenses pour l’exercice 2008, la Cour constate que ces départs au courant de 2008 ont permis une économie de rémunérations de 143.931,94 euros durant cette année.
Le taleau ci-dessous énonce les initiales du salarié ayant quitté l’entreprise, la date de sortie, le nombre de mois restant jusqu’à la fin de l’année, le salaire brut mensuel (économisé) et le montant de l’économie réalisée par salarié.
Suivant le certificat établi le 9 juillet 2009 par un associé de la société fiduciaire ayant établi les comptes, les frais de personnel étaient de 1.334.299,49 euros au 31 décembre 2006, de 1.324.916,51 euros au 31 décembre 2007 et de 1.255.120,71 euros au 31 décembre 2008.
En 2008, la diminution des frais de personnel était donc de 69.795,80 euros par rapport à 2007, malgré l’économie de 143.931,94 euros sur les rémunérations des dix salariés. Le montant de 74.136,16 euros n’a pas été économisé.
L’employeur reconnaît deux nouveaux engagements le 1er avril 2008, en remplacement d’un salarié parti le 31 mars 2007 et en remplacement d’un congé de maternité du 31 décembre 2007 (donc à partir du quatrième mois du congé).
En admettant que ces deux salariés aient travaillé jusqu’à la fin de l’année pour une rémunération de 2.451 euros (salaire moyen des huit salariés les mieux rémunérés partis en 2008), les rémunérations s’élèvent à 44.118 euros.
L’employeur reconnaît aussi l’engagement de LD le 1er avril 2008. Etant donné que ce salarié est repris au tableau des départs de 2008 (il est parti le 25 juin), cet engagement/ départ est comptabilisé comme économie de 12.584,70 euros.
En considérant, d’une part, l’engagement de trois nouveaux salariés le 1er avril 2008 et, d’autre part, le fait que le montant de 74.136,16 euros n’a pas été économisé sur les frais de personnel, la Cour retient qu’il n’est pas établi que le licenciement du 27 mars 2008 soit motivé par un souci de réduction de la masse salariale par la suppression du poste de M. A.) dans le but d’éviter d’éventuels risques financiers mettant en péril l’entreprise entière.
Ainsi que l’a retenu le tribunal du travail, le licenciement, intervenu sans motif réel et sérieux, est abusif.
L’examen ci-avant tient compte des départs de 2008 et des frais de personnel ainsi que des nouveaux engagements pertinents de 2008.
Cet examen permettant à lui seul d’apprécier le licenciement, l’offre de preuve relative aux départs est sans pertinence.
Il en est de même en ce qu’elle concerne l’évolution de la situation financière de l’entreprise et l’évolution du département « prothèses amovibles » et la qualification du salarié pour changer de département.
Le motif d’économie sur la masse salariale étant contredit par l’examen précédent, l’examen de la situation financière est sans intérêt. Le motif du licenciement constitue le souci de réduction de la masse salariale, et non la diminution de l’activité du département « prothèses amovibles » au sein duquel travaillait le salarié licencié. L’offre de preuve ne peut pas porter sur un motif qui n’a pas été invoqué dans la lettre de motivation.
L’appel de l’employeur n’est pas justifié. C.S.J., 13/10/2016, 41480).