Un enfant a été placé au sein d'une famille d'accueil à l'âge de six ans, dans laquelle il a grandi et s'est épanoui.
Agé de dix-neuf ans, et avec sa famille d'accueil, la décision est prise d'entamer une procédure en vue de son adoption simple par les personnes qu'il considère comme ses parents. Cette adoption simple lui permettra de conserver des liens avec sa famille d'origine, à la différence d'une adoption plénière.
Ce jeune homme est appelé, depuis sa naissance et jusqu'à ce jour, par son nom patronymique d'origine, qu'il souhaite conserver, comme élément essentiel de son identité.
La rédaction laconique de l'article 359, alinéa 1er du Code civil, dans sa version modifiée par la loi du 23 décembre 2005 relative au nom des enfants, semble cependant ne laisser aucune place à l'interprétation : « l'adoption confère à l'adopté le nom de l'adoptant ».
La lecture de cet article, combinée à l'article 358 du même Code, aurait cependant dû permettre à l'adopté de conserver son nom patronymique, dans la mesure où, en cas d'adoption simple « l'adopté reste dans sa famille d'origine et y conserve tous ses droits et obligations, notamment ses droits héréditaires ».
En première instance, le Tribunal ne peut que constater l'existence d'un véritable lien affectif parents-enfant, et prononce l'adoption simple.
Mais le Tribunal refuse au jeune homme la possibilité de conserver son nom patronymique d'origine, en appliquant purement et simplement l'article 359, alinéa 1er du Code civil.
À dix-neuf ans, l'adopté doit donc changer de nom patronymique s'il souhaite voir aboutir la procédure d'adoption simple.
Si la position du Tribunal peut sembler juridiquement correcte, elle s'avère être parfaitement inadaptée, notamment au regard de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme, qui protège la vie privée et familiale. Le nom patronymique fait indéniablement partie de la vie privée et familiale.
Appel est interjeté contre le jugement rendu.
En date du 28 octobre 2009, la Cour d'appel (arrêt n°35105 du rôle) a notamment retenu qu' « Outre l'incohérence de la loi, il y a lieu de remarquer que si une substitution de nom est facilement accepté par de jeunes enfants dont l'identité est encore en train de se construire, elle peut cependant être ressentie comme une véritable amputation de leur identité par des enfants plus âgés ou a fortiori par des personnes adultes.
En faisant ainsi perdre sans nécessité son nom à l'adopté, l'Etat du Grand-Duché de Luxembourg a méconnu son obligation de respecter la vie privée et familiale de l'adopté au sens de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme ».
La Cour a encore précisé que « le juge n'étant pas législateur, il ne lui appartient pas d'amender la loi, mais simplement d'empêcher (...) l'atteinte au droit consacré tout en appliquant la loi pour le surplus ».
Dans cet arrêt, la Cour a reconnu le droit pour l'adopté simple de conserver son nom patronymique d'origine, et de le voir accolé au nom de l'adoptant.
Devant « l'incohérence de la loi », mais sans pour autant sortir du cadre légal, la Cour a pris l'heureuse initiative de statuer dans l'intérêt commun de la famille.
De telles situations mettent en évidence un certain malaise, auquel seule l'intervention du législateur pourra mettre fin.