Le 26 juillet 2016, le Conseil de la Concurrence luxembourgeois a adopté une décision dans laquelle il a souligné que les prix de vente imposés, c'est-à-dire les accords ou pratiques concertées entre un fournisseur et un distributeur conduisant à des prix fixes ou minimaux pour les utilisateurs finaux, constituent une violation substantielle et par objet du droit de la concurrence luxembourgeois et européen.
Clarification des critères applicables
Le Conseil de la Concurrence a précisé les critères applicables, qui aideront sans aucun doute les entreprises à (mieux) évaluer si leurs pratiques constituent ou non une pratique illégale de prix de vente imposés. Ces critères sont les bienvenus. En effet, même si la Commission Européenne a fourni quelques indications sur les pratiques de prix de vente imposés dans ses Lignes directrices de 2010 sur les restrictions verticales, il est parfois très difficile de distinguer entre, d'une part, les pratiques illégales de prix de vente imposés conduisant à des prix minimaux ou fixes et d'autre part, les prix recommandés qui sont en principe admis en vertu du droit de la concurrence.
Les critères pertinents du Conseil de la Concurrence sont les suivants (et sont également ceux appliqués par l'Autorité de la Concurrence française :
- l'existence d'un prix de vente qui a été communiqué ou discuté entre le fournisseur et le distributeur ;
Cette condition sera donc également satisfaite si le prix de vente est officiellement présenté par le fournisseur comme étant un prix recommandé.
- l'existence d'une politique de prix ou, le cas échéant, de surveillance des prix ;
Cette condition sera évidemment remplie lorsque le fournisseur menace le distributeur afin qu'il respecte les prix de vente communiqués, mais ce sera également le cas lorsque les concurrents du distributeur dénoncent la non-conformité avec de tels niveaux de prix, ou lorsque le fournisseur rappelle simplement au distributeur les prix de vente applicables. Une surveillance régulière des prix serait également suffisante pour remplir cette condition, mais il est évident que la fréquence de la surveillance jouera un rôle dans ce cas (une surveillance hebdomadaire ou mensuelle des prix étant considérée être une indication plus sérieuse des pratiques de prix de vente imposés qu'une surveillance de prix annuelle).
- l'application significative par le distributeur des prix de vente communiqués.
La question qui se pose dans ce contexte est bien sûr de savoir ce que recouvre la notion d'application "significative". Conformément à la jurisprudence de la Cour d'appel française, l'application des prix de vente communiqués est significative lorsque le distributeur suit ces prix (ou des prix qui ne s'en écartent que légèrement) dans 80% des cas. Cependant, il ne peut être exclu que la Conseil de la Concurrence luxembourgeois accepterait également un pourcentage plus faible (mais probablement supérieur à 50%).
Programme de clémence également pour les pratiques verticales
Dans la communication officielle en rapport avec cette décision du 26 juillet 2016, le Conseil de la Concurrence a également précisé que son programme de clémence est aussi ouvert pour les accords verticaux et en particulier pour les pratiques de prix de vente imposés. Cette position du Conseil de la Concurrence luxembourgeois est contraire à l'approche générale des autorités nationales de la Concurrence au sein du Réseau Européen de la Concurrence, mais elle est tout à fait compréhensible compte tenu de ses ressources limitées. L'ouverture du programme de clémence aux accords verticaux de pratiques de prix de vente imposés peut conduire à une quantité importante de demandes de clémence, ce qui faciliterait les opérations d'exécution du Conseil de la Concurrence, en particulier dans les secteurs prioritaires tels que le secteur des biens de consommation courante.