26/09/14

Marchés publics: une stratégie bien pensée pour les aborder

Participate in a public procurement and submit an offer accordingly is a significant achievement for an undertaking. It must be prepared and aware of the constraints and benefits of the Luxembourg legal regime. This article focuses on the necessary preparation of the bidding undertakings and the judicial actions and remedies available to them before and after the auction.

1. Nécessité d'une préparation efficace des procédures de marchés publics par les entreprises soumissionnaires

La participation à une procédure de passation d'un marché public au Grand-Duché de Luxembourg est régie par un corps de règles encadrant la liberté des pouvoirs adjudicateurs et des entreprises soumissionnaires. Cet arsenal législatif a pour objectif de permettre aux pouvoirs publics de contracter avec des entreprises privées tout en assurant une concurrence efficace et saine entre celles-ci.

Face à la complexité et à la technicité de ces règles, la rédaction de dossiers de soumission et les décisions d'adjudication qui en découlent donnent lieu à un contentieux de plus en plus important devant les juridictions administratives et judiciaires.

L'entreprise, qui entend participer à la passation d'un marché public au Grand-Duché de Luxembourg, doit être doublement vigilante. D'une part, elle est astreinte à un ensemble de règles dont le respect limite nécessairement son action sur le marché. D'autre part, l'entreprise a à sa disposition des règles de protection, dont elle a tout intérêt à connaître le contenu afin de pouvoir les mettre en œuvre en temps utile.

Le recours aux règles de protection permettant aux soumissionnaires lésés de contester l'action du pouvoir adjudicateur doit se faire rapidement et efficacement, a fortiori lorsque le contentieux concerne une décision d'adjudication. Dans cette hypothèse, le soumissionnaire évincé doit agir au plus vite au fond et en référé, afin de suspendre la procédure de passation du marché avant la signature du contrat entre le pouvoir adjudicateur et le soumissionnaire retenu.

En pratique, nous conseillons à toute entreprise désireuse de participer à un marché de s'adjoindre l'aide d'une équipe juridique dès la réception du dossier de soumission. L'avis d'un spécialiste du droit permettra ainsi à l'entreprise de :

  • vérifier sa bonne compréhension du dossier de soumission et plus particulièrement du cahier des charges ;
  • faire usage, le cas échéant, du droit laissé à tout opérateur économique, en amont du dépôt de son offre, de poser des questions au pouvoir adjudicateur ou à la commission des soumissions quant au contenu du dossier de soumission ; et
  • préparer l'esquisse du recours contentieux en cas d'éviction de l'entreprise, et permettre ainsi une action judiciaire rapide et efficace.

2. Complexité du contentieux en matière de marchés publics

Plusieurs types de recours en matière de marchés publics s'offrent au soumissionnaire. Dans le cadre de la passation d'un marché public dit « classique » (livre I de la loi du 25 juin 2009 sur les marchés publics), des mécanismes de réclamation et des actions judiciaires sont organisées à plusieurs moments-clés de la procédure.

Dans un premier temps, un soumissionnaire peut agir en amont du dépôt de son offre, au moment de la préparation de celle-ci, dès lors qu'il estime que le dossier de soumission contient une erreur, omission ou ambiguïté constituant une illégalité. Une telle illégalité existe notamment en cas de confusion dans le cahier des charges des critères de sélection et d'adjudication, de clause discriminatoire (clause du cahier des charges détaillant une spécification technique avec un degré de précision tel que, de facto, un seul produit, marque ou fournisseur est possible, à l'exclusion de tout autre), ou encore en cas d'exclusion de l'indemnisation de l'adjudicataire suite à une modification du contrat initiée par le pouvoir adjudicateur.

Dans ces situations, le soumissionnaire lésé peut notamment déposer, au plus tard sept jours avant l'ouverture des offres, une réclamation écrite au pouvoir adjudicateur signalant l'illégalité. Face à une jurisprudence administrative ne précisant pas clairement si l'absence de réclamation entraîne la forclusion du soumissionnaire à se prévaloir de cette illégalité devant le juge administratif, nous conseillons à nos clients de procéder systématiquement par voie de réclamation écrite en cas de doute quant à la légalité d'une clause contenue dans un dossier de soumission.

Dans un deuxième temps, dès l'ouverture des offres et la réception du courrier d'éviction, le soumissionnaire lésé a le droit d'introduire un recours en annulation devant le Tribunal administratif en vue de contester la légalité de la décision d'adjudication. Afin de suspendre l'exécution de la décision d'adjudication et bloquer ainsi la signature du contrat d'adjudication, un recours en sursis en exécution doit être déposé devant le Président de la juridiction.

Le pouvoir adjudicateur a l'obligation d'attendre un délai minimal de quinze jours entre l'information donnée aux soumissionnaires évincés quant à leur éviction et la signature du contrat avec l'adjudicataire. En conséquence, le soumissionnaire évincé doit agir très vite pour, endéans ce délai, saisir le Président d'une demande de sursis à exécution, voire obtenir une ordonnance, afin de suspendre la procédure d'adjudication et éviter la signature du contrat.

Après la conclusion du contrat d'adjudication, il n'est plus possible de remettre en cause l'existence de ce contrat, qui sera donc exécuté. Le soumissionnaire irrégulièrement évincé ne pourra plus prétendre qu'à l'octroi de dommages et intérêts par le juge judiciaire, en réparation du préjudice subi.

Enfin, à ces procédures de base, viennent s'ajouter pour certains marchés publics dits « de grande envergure » (livre II) et « secteurs spéciaux » (livre III) la possibilité d'introduire des recours spécifiques. Ces recours sont régis par la loi du 10 novembre 2010 instituant les recours en matière de marchés publics.

Pendant la préparation du dossier de soumission, un soumissionnaire s'estimant lésé par une violation du droit communautaire ou du droit national transposant le droit communautaire en matière de marchés publics de grande envergure ou secteurs spéciaux, peut initier un référé particulier, dit « précontractuel ». Le Président du Tribunal administratif saisi d'un tel recours dispose de compétences étendues pour prendre toute mesure nécessaire en vue de corriger la violation alléguée jusqu'à la décision d'adjudication. Il peut, par exemple, en cas de confusion des critères de sélection et d'adjudication dans le cahier des charges, suspendre la procédure de passation du marché public et ordonner au pouvoir adjudicateur de modifier les critères choisis. 

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